Pour sauver le chien de berger de Savoie


On vient de s'apercevoir qu'il n'existerait plus que quelques dizaines de chiens répondant aux caractéristiques du berger de Savoie. Or le berger de Savoie (encore dénommé berger des Alpes) est plus qu'un chien. Il est un des pans du patrimoine de notre pays à lui tout seul et tient une place de choix dans l'imaginaire affectif des Savoisiens. En effet depuis toujours, les gens des Alpes ont vu ce chien auprès d'eux et les enfants envoyés aux champs pour garder les vaches comptaient beaucoup sur cet auxiliaire sans faille. Comment ne pas être attendri lorsque ce berger de Savoie vous regarde d'un air inspiré et enamouré pour mieux vous contourner et vivre comme bon lui semble, en esprit de liberté, et l'adage populaire ne dit-il pas tel chien, tel maître?

D'abord recenser le chien de la Savoie.

À cause de son origine rurale cette race est malheureusement restée longtemps dans l'ombre. En 1947, mademoiselle Bruder, une architecte suisse, recueillit lors d'une excursion en Savoie un chien arlequin qu'elle appela Grigio. Elle le prit tout d'abord pour un "sans race", et ce n'est qu'en poursuivant son périple qu'elle s'aperçut qu'il y avait couramment dans les fermes un chien du même type. Le berger des Alpes était enfin découvert. L'ayant trouvé en Savoie, elle le dénomma "berger de Savoie". Ce n'est que plus tard que l'on s'est aperçu que ce chien était présent dans toute la chaîne alpine et qu'il fut rebaptisé à cause de cela "berger des Alpes". Ce chien de ferme sait tout faire: chasser, tuer des rats, garder la maison, tenir compagnie et donc garder et ramener le troupeau.

Un peu comme les porcs de Savoie, tel le cochon noir de Maurienne (voir l'Echo de Savoie n° 54 et 55), ou certaines races de brebis, il est menacé d'extinction alors qu'avant la dernière guerre, il était majoritaire.

Les années 70, avec la société de consommation en vogue, vont lui porter un coup qui aurait pu lui être fatal en l'assimilant à une Savoie sous-développée: le berger allemand puis le berger des Pyrénées, le beauceron et enfin le Border, vont le plus souvent le remplacer.

Aujourd'hui, la société du berger de Savoie ( Société du berger de Savoie, Mairie, Crest-Voland 73 590), présidée par Line Perrier, que nous connaissons pour ses travaux universitaires d'une grande qualité sur la langue savoyarde, a commencé le recensement des bergers de Savoie dans le cadre d'une mission confiée par la nouvelle Assemblée (des Pays) de Savoie: "Il faut recenser et sélectionner les sujets tels que les anciens les ont connus, appréciés et fait travailler" explique Line Perrier qui ajoute: "Le plus difficile est de répertorier les propriétaires qui ne savent même pas qu'ils possèdent un berger de Savoie."

Un combat identitaire.

Comme dans le domaine de la langue, il s'agit de ne pas voir une partie importante du patrimoine savoyard disparaître en subissant le laminoir à tuer les différences qu'impose à l'humanité toute entière la mondialisation libérale.

D'après les études de Line Perrier, le berger de Savoie n'est pas né au début du 20e. siècle comme les races actuelles, mais bien avant, plutôt au début du 19e. lorsque les agriculteurs, en se repassant les bons sujets sur le marché, ont fait ce chien. Les membres de sa société, notamment à l'aide de gravures et de tableaux datant de 1850, ont défini les critères de la race.

Aujourd'hui la société des bergers de Savoie ne voit qu'une garantie face au danger de l'extinction possible de celle-ci: sa reconnaissance administrative comme race à part entière par la Société Centrale Canine. Pierre Brzezinski, président de la société canine Rhône-Alpes, soutient le projet: "Il n'y a pas eu, à ma connaissance, de nouvelles races de chiens en France authentifiées depuis au moins 20 ans. La dernière reconnue l'a été il y a 3 ans, il s'agit du berger australien. Et ce fut une bataille de plusieurs dizaines d'années!"

Il s'agit donc d'un parcours de longue haleine dans laquelle s'est engagée la société des bergers de Savoie qui veut d'abord garantir et protéger le standard avant que la race ne soit reconnue.

À ce sujet on ne peut qu'être dubitatif sur le rôle que joue la nouvelle Assemblée (des Pays) de Savoie, puisque le recensement à été financé pour la première année par les deux départements mais cette année par la Savoie du Sud seule, la Savoie du nord refusant de renouveler la mission. Pour ce qui est de la langue savoyarde , c'est exactement l'inverse, la Savoie du sud ne donne plus un seul centime. Cette attitude est absolument scandaleuse puisque la défense et la promotion de la culture identitaire doit être une priorité absolue avec les produits identitaires, la langue, notre façon d'être et nos races animales originales. On ne nous fera pas croire qu'il y a deux  Savoie en procédant de cette manière, ni qu'il existe une véritable volonté politique permettant de sauvegarder et de promouvoir tous ces précieux biens patrimoniaux pour construire la Savoie humaine de demain.

Pascal Garnier.  

Fiche descriptive du berger de Savoie (tirée du site internet http://www.berger-des-alpes.fr sur lequel vous trouverez quelques jolies photos):

C'est au premier regard un chien compact sans lourdeur, musculeux et de taille moyenne.
Taille: 47 à 55 cm au garrot.
Poids: 20 à 30 kg.
Les mâles sont nettement plus costauds que les femelles avec une tête, un crâne, beaucoup plus développés.
De profil, il est un peu plus long que haut. Son corps est large avec un poitrail profond. La peau assez épaisse est un peu lâche, donnant un peu de fanons sous le cou.
Le poil est double, fourni, bien plaqué sur le corps, le protégeant efficacement des intempéries.
La robe est de couleur noir et feu ou arlequin et feu avec plus ou moins de panachure (taches blanches apparaissant sur le poitrail, le bout des pattes et de la queue, le cou), celle ci ne doit pas envahir plus d’un tiers du pelage. Les marques feu vont de la couleur crème à l'acajou soutenu.
Ces formes arrondies, généreuses, donnent envies de câliner ce chien qui, d'ailleurs, adore les caresses.
Son expression est douce et un peu triste. Ses yeux sont le plus souvent noisette, parfois bleus pour la robe arlequin. Ils sont assez grands.
L'ensemble donne un aspect débonnaire. Pourtant, ne vous y fiez pas, il peut être très agile, montrant une vivacité qui étonne soudain.

 

Dernière mise à jour : 01/06/02